Chomage

CHOMAGE

 

Jean-Luc Ginder dans "Economie matin" du 22 juin 2015 Article intitulé : Pas de vraie reprise économique mais un chômage se transformant en emplois "low cost"

" L’avenir ne laisse pas apparaître une vraie reprise économique mais plutôt une tendance du chômage à transformer les emplois en emplois « low cost ». La consommation des ménages est stable en France depuis 4 ans. Ce sont 4 années de croissance 0. Les Français ont cessé de consommer, ils ont fait le dos rond. L’augmentation de la consommation annoncée s’explique uniquement par l’augmentation du nombre de Français qui consomment (+0.5% par an). Les Français seront donc plus nombreux à consommer mais la consommation individuelle diminue.
Un Français consomme moins aujourd’hui qu’en 2011
Le problème est ainsi posé pour une entreprise qui aspire à voir ses carnets de commande se remplir dans un climat de consommation réduite. D’autant plus qu’entre 2011 et 2014, la consommation de produits français a baissé, et a été remplacée par des produits étrangers importés. Sur cette même période la France a perdu en compétitivité en dehors de la zone Euro malgré la conjoncture favorable, et le phénomène a été accentué par la baisse des salaires dans les pays du sud de la zone Euro.
Ce qui nous est annoncé comme une reprise économique à 1.4% n’est en réalité qu’un effet de rattrapage de la consommation des ménages. La croissance est donc artificiellement tirée vers le haut car les consommateurs ne peuvent plus faire autrement et qu’ils sont eux même en difficulté. Cette consommation sera essentiellement énergétique en raison de la baisse des prix du pétrole (20 milliards de transferts qui représentent 1 point de PIB). Se dessine donc avant tout une nouvelle croissance des inégalités reposant sur une politique de l’offre financée par les ménages français.
En économie, la croissance ne réside en la seule consommation
La croissance dépend de deux autres facteurs : l’investissement des entreprises et le commerce extérieur. On ne note aucune reprise au regard des chiffres pour l’investissement et des résultats désastreux pour le commerce extérieur malgré la baisse de l’Euro. Comment croire en une reprise économique alors que les éléments chiffrés annoncent une dégradation dans un environnement économique pourtant idéal ?…..un Euro à la baisse, un prix du pétrole bas des taux d’intérêts à 0%….Et cependant la machine économique française reste et restera bloquée…..
Les Français ne verront vraiment leur avenir s’améliorer que lorsque le chômage diminuera
Les annonces des chiffres dits de croissance ne sont plus crédibles, ils attendent les chiffres de l’emploi. Malheureusement, ces derniers ne s’inverseront pas sans une augmentation des inégalités sociales. Des jours maigres s’annoncent à nous. L’explication réside dans l’augmentation des salaires plus rapide que les gains de productivité. Ce phénomène entraîne mécaniquement une augmentation du chômage.
En économie théorique cela se contrôle, mais un nouveau modèle commercial est un changement central aux effets humainement dramatiques. La digitalisation de l’économie ne créera pas d’emplois mais elle en détruira en grande quantité. Il devient donc urgent et impératif de réexaminer les fondamentaux sociaux.
La France de demain va vers un monde dans lequel moins d’emplois seront proposés
Le rôle de l’Etat est d’anticiper, d’organiser cet avenir. Les questions posées sont les suivantes : Peut-on produire de la croissance ? Distribuera-t-on moins de travail ? Est-il urgent de revoir la question du temps de travail ? A ces trois questions la réponse est oui.
La problématique de la répartition du temps du travail est fondamentale pour l’emploi
En effet, comment faut-il rétribuer le salarié qui surveille une machine qui s’auto surveille électroniquement ? L’intérêt économique n’est plus là. On peut par contre employer cette même personne à un poste plus valorisé. Le logiciel du temps de travail légal en France est à revoir en profondeur pour préparer la société de demain, la nôtre et celle de nos enfants.
Les projections chiffrées nous permettent déjà d’annoncer que la moitié des emplois intermédiaires seront touchés par l’usage de la digitalisation d’ici 10 à 20 ans. Les emplois les plus touchés par cette transformation seront essentiellement les emplois d’encadrement dit intermédiaires. Les salariés ne peuvent qu’avoir que beaucoup de difficultés à accepter cette évolution. La seule issue pour réduire le chômage sera humainement dramatique et il repose sur une transformation de la société en profondeur. Cette méthode a déjà été mise en place aux Etats-Unis, en Angleterre et en Allemagne. Ces pays ont fortement réduit leur chômage en créant une base d’emplois « low cost » / « prix bas », répondant à la nécessité de répondre à un besoin d’occuper des emplois à petits et très petits salaires. Les emplois intermédiaires sont amenés à disparaître d’ici 10 à 20 ans et dramatiquement ce sont des emplois « prix promotionnels », des emplois à tarifs très bas qui les remplaceront.
Aujourd’hui le taux de chômage réel est à 20% de la population. Les découragés en fin de droit qui ne s’inscrivent plus à Pôle Emploi sont intégrés à ce chiffre. Est-il mieux d’avoir un travail plutôt que d’être au chômage et créer ainsi le plein emploi et produire une vraie croissance ? On sait maintenant que la création d’emplois attendue se fera, ou ne se fera pas, qu’au travers des emplois « petits prix » D’un point de vue social, cet horizon est désarmant. Sommes-nous tous prêts à cela ?

 Jean-Christophe Chanut dans "La Tribune" du 18 juin 2015 Article intitulé : La France va enfin créer des emplois en 2015... mais le chômage ne baissera pas

" Selon la dernière note de conjoncture de l'Insee, pour la première fois depuis trois ans, la France va créer des emplois dans le secteur marchand cette année (+ 41.000). Mais cette reprise ne sera pas suffisante pour faire baisser le chômage du fait de la progression de la population active. Le plus dur est-il passé sur le front de l'emploi ? A en croire la dernière note de conjoncture de l'Insee, l'embellie semble maintenant très proche. Mieux même, pour la première fois depuis trois ans, l'emploi marchand non agricole augmenterait en 2015 avec un solde positif de 41.000 postes supplémentaires, avec une nette accélération au second semestre (+ 35.000 postes, après seulement + 6.000 au premier semestre).
41.000 postes supplémentaires dans le secteur marchand
Un sacré contraste avec l'année précédente où la France avait encore perdu 45.000 postes dans le secteur marchand. Dans le secteur non marchand, c'est moins une surprise car le gouvernement met le paquet sur les contrats aidés, l'emploi continuerait d'augmenter cette année (+ 53.000). Au total, l'emploi progresserait de 114.000 postes en 2015  après + 41.000 en 2014. Mais, l'année dernière, cette progression était uniquement due au seul secteur non marchand. Un résultat, note l'institut de la statistique, imputable à l'élévation du rythme de croissance (1,2% attendu en 2015) et aux effets de l'enrichissement de la croissance en emplois dus à la mise en place du Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) et au pacte de responsabilité.
Signe avant-coureur d'une reprise des embauches, le nombre des intérimaires va légèrement augmenter cette année (+10.000).
L'industrie et la construction vont encore perdre des postes
Si l'on se concentre sur les grands secteurs d'activité, il apparait que le tertiaire devrait créer 64.000 postes au second trimestre (hors intérim), après 42.000 au premier semestre. En revanche, dans l'industrie, les pertes d'emplois vont perdurer en s'atténuant tout de même. Après avoir perdu 35.000 postes en 2014, le recul ne serait plus « que » de 14.000 postes au premier semestre puis de 11.000 au second. Le même constat s'impose dans la construction où l'emploi n'a cessé de baisser depuis la crise de 2008-2009. Après 45.000 postes supprimés en 2014, ce nombre atteindrait... 50.000 cette année. 
Mais les créations d'emplois attendues en France cette année vont avoir un effet très limité sur le chômage selon l'Insee, en phase sur ce point avec les perspectives de l'Unedic dévoilées mari 16 juin.
Le taux de chômage va quasi stagner
Déjà, au premier trimestre, le nombre des demandeurs d'emploi a diminué de 38.000 (selon la définition du « chômeur » retenue par le Bureau international du travail qui diffère de celle de Pôle emploi). Résultat, le taux de chômage en France métropolitaine s'est réduit de 0,1 point en un trimestre, passant de 10,1% à 10%. Au second semestre, le chômage resterait quasi stable avec un taux de chômage de 10,1% car les créations nettes d'emploi seraient suffisantes pour compenser la hausse de la population active. Au total, sur l'ensemble de 2015, la population active croîtrait de 107.000 personnes après 180.000 en 2014.

 Amid Faljaoui dans "Trends Tendances" Belgique du 17 juin 2015 Article intitulé : Voici la seule manière de gagner la guerre contre le chômage... et les robots

" Il y a 5 ans, presque jour pour jour, le 10 juin 2010 pour être précis, le monde entier a franchi un pas important sans s'en rendre compte. Sans le savoir, nous avons franchi le "point Lewis". Et ce "point Lewis" (1), nommé ainsi en l'honneur du prix Nobel d'économie Arthur Lewis, désigne le moment critique où la main d'oeuvre d'une économie émergente n'est plus considérée comme illimitée, ce qui provoque des hausses de salaire ! Et ce point critique a donc été atteint le 10 juin 2010. Autrement dit, depuis cette date-là, et cela s'est vérifié, les salaires en Chine sont en croissance régulière, notamment suite à des milliers de grèves qui éclatent chaque jour un peu partout dans le pays.
Les plus pessimistes diront que ce n'est pas parce que la Chine voit ses salaires augmenter, qu'il n'est pas possible de délocaliser ailleurs, au Vietnam par exemple. Bref, là où les salaires sont encore plus bas. C'est vrai, mais cela n'enlève rien à la pertinence du "point Lewis", car s'il est possible de trouver des salaires plus bas qu'en Chine, il est impossible d'en trouver autant ! Donc, a priori, c'est une bonne nouvelle pour les salariés occidentaux qui après presque 30 ans de délocalisation peuvent espérer respirer.
Mais ce ne sera pas aussi simple. Car si la Chine augmente ses salaires, la révolution numérique, et ce qu'on appelle la "robolution" (2) - contraction des mots révolution et robotisation - risque de faire disparaître 47% des emplois américains. En Belgique, une étude similaire de la banque ING arrivait quasi à la même conclusion. Donc, on pourrait se dire que nous n'avons pas de bol: alors que les Chinois commencent enfin à avoir des salaires décents et qu'ils ne pourront plus mettre la pression sur nos propres salaires, voilà que la robotisation ne nous laissera pas le temps de souffler, la plupart de nos emplois routiniers, y compris ceux des cadres, risquant de passer à la trappe !
Voici la seule manière de gagner la guerre contre le chômage... et les robots
En réalité, personne n'en sait rien, et le pire n'est pas toujours certain. L'histoire montre que le progrès technique supprime des emplois, mais en crée d'autres auxquels personne n'avait pensé. Pensez par exemple à l'industrie automobile: la voiture a remplacé les chevaux, ce qui veut dire que des milliers d'emplois de maréchaux-ferrants, de palefreniers, de cochers ont disparu progressivement, mais il n'y avait pas non plus de régleurs de moteur pour un cheval et des concepteurs-désigner non plus ! Et lorsque l'électricité a fait son apparition, les vendeurs de bougies n'ont pas été contents, mais globalement, la société s'en est trouvée mieux et d'autres jobs ont vu le jour. À condition que la population soit formée, éduquée aux métiers du futur. Et ça, c'est la responsabilité des pouvoirs publics et des entreprises. C'est la seule manière de gagner cette guerre contre ce cancer économique qu'est le chômage.
(1) C'est Sylvain Guyton (EcoVadis) qui a rappelé ce point dans le journal Le Monde.
(2) Selon l'expression de Bruno Bonnell, fondateur de Robolution Capital"

  Alain Desert dans "Economie matin" du 4 juin 2015 Article intitulé : Une pédagogie insuffisante sur les chiffres du chômage
 
"On a vu en ce début de mois tomber les derniers chiffres du chômage, le rituel mensuel que les journaux de 20 heures commentent avec toute l’approximation qui s’impose lorsqu’il n’y a que quelques minutes d’experts à glisser dans une actualité souvent trop chargée. Les données du mois d’avril, comme pour les mois précédents, ont été présentées à travers 3 chiffres clés, toujours les mêmes, à la fois évocateurs pour caractériser l’ampleur du phénomène mais insuffisants pour en comprendre les ressorts.
    •    3540000 chômeurs en avril 2015: c’est le niveau du chômage de la catégorie A en France métropolitaine (chômeurs sans aucune activité).
    •    +26200 : c’est la variation en valeur absolue
    •    +0.7% : c’est la variation en valeur relative
C’est évidemment une énorme claque pour le gouvernement qui avait certainement inscrit dans son agenda quelques zones d’espoir, à la lecture de la croissance miraculeuse du premier trimestre (+0.6%).
Mais revenons vite aux chiffres. Les données citées précédemment sont tout à fait incomplètes pour analyser et comprendre correctement le phénomène. Pourquoi ne présente-t-on pas (ou que rarement) les variables de flux pour mieux appréhender les dynamiques ? Combien de créations et de destructions d’emplois dans le secteur privé (le flux) ? Y a-t-il eu création ou destruction nette d’emplois (le solde). Combien de chômeurs ont retrouvé un emploi et quelle répartition entre public et privé? On ne peut donc se satisfaire d’une vision statique du chômage. On ne peut comprendre le marché de l’emploi et le drame qui en résulte que dans une description dynamique faisant intervenir à la fois les variables de niveaux et les variables de flux. Malheureusement ces dernières ne sont que rarement citées.
Prenons un exemple pour imager les choses. Lorsque vous entrez dans un supermarché, vous avez la possibilité de voir tous les produits à la vente. C’est la partie la plus visible du magasin, comme la célèbre catégorie A des chômeurs, celle qui fait l’objet chaque mois d’un petit décryptage au journal du 20h. Vos yeux ignorent le stock à moitié caché mais toutefois visible tout en haut des rayonnages. Vous avez aussi le stock dans la réserve, le stock caché que vous ne verrez jamais, à l’image des chômeurs non inscrits.
Mais comment pourrais-je avoir une petite idée de l’activité de mon petit magasin si je me limite à la vision des stocks, si rien ne m’informe sur les composantes de flux, à savoir les ventes et les livraisons journalières. Si beaucoup de gens ont retenu qu’il y a eu 26000 chômeurs de plus en avril (je le répète, résultat d’un solde), qui sait combien de personnes ont retrouvé un emploi, et combien l’ont perdu ?
Quand je parle de dynamique, il faut évidemment le prendre au sens « dynamique des systèmes », car chacun l’a bien noté, le dynamisme du marché de l’emploi est plutôt atone dans notre pays contrairement à d’autres pays développés qui ont vu ces dernières années leur chômage baisser. C’est le cas de l’Allemagne, de l’Autriche, de la Grande Bretagne, des Etats-Unis, et beaucoup d’autres pays européens. Cette incapacité chronique de la France à résoudre son problème de chômage démontre bien la faiblesse des actions gouvernementales quels que soient les partis au pouvoir.
Le ministre du travail a aussitôt réagi et « pris les choses en main » en annonçant 100000 emplois aidés supplémentaires venant gonfler les 450000 existants. Le fait que la courbe du chômage ne se soit pas inversée avec un tel niveau d’intervention publique, doit être une réelle source d’inquiétude sur la capacité de la France à redresser son économie. Cette politique de cache misère, parfois nécessaire en période de crise, devrait être accompagnée, avec la même promptitude, de mesures fortes et efficaces, celles qui demandent un vrai courage politique.
Dans le traitement du chômage, tout ne pourrait être que bon sens et volonté, même si on doit rester conscient que rien n’est simple dans un monde compliqué, où les intérêts de chacun divergent, et où les comportements fluctuants de nos dirigeants, à l’image d’un bateau ivre,  mélangent les chocs de simplification fortement « claironnés » et rarement concrétisés, avec les chocs de complexification judicieusement cachés mais toujours activés."

  Paolo Garoscio dans "Economie matin" du 15 mai 2015 Article intitulé : Pour faire baisser le chômage Pôle Emploi veut radier massivement

 " L'une des conditions pour être inscrit à Pôle Emploi est toucher le chômage est de chercher activement du travail. Et il faut chercher car Pôle Emploi, en général, n'est pas vraiment sur le coup et ne vous propose rien. Mais faute de trouver, certains abandonnent la recherche et le gouvernement en a marre : les contrôles vont être renforcés et bon nombre d'inscrits qui ne cherchent pas effectivement du travail vont être radiés. Et le chômage va, par magie, baisser !
Trois étapes avant la radiation de Pôle Emploi
Les chômeurs qui ne cherchent pas effectivement du travail commencent à peser sur les caisses de l'Etat... et en plus ils sont nombreux puisqu'il n'y a pas de travail en France. Alors le gouvernement a décidé d'agir.
A partir du mois d'août 2015 les contrôles seront renforcés dans la lignée de l'expérimentation menée par le gouvernement dans trois régions françaises. Les chômeurs soupçonnés de profiter du système vont devoir passer par trois étapes et risquent de se faire radier.
Au programme : un questionnaire puis un entretien téléphonique. Si besoin un "processus de redynamisation" sera mis en place pour le chômeur en question et si rien ne change alors ce sera la radiation.
Pôle Emploi craint... pour ses agents
L'idée est bonne et même juste : si on ne cherche pas du travail on n'a pas le droit au chômage (et ce même s'il n'y a pas de travail là où l'on habite). Mais ceux qui risquent de faire les frais de cette réforme sont les conseillers de Pôle Emploi qui vont devoir radier les chômeurs.
Pôle Emploi compte donc préparer aux foudres des radiés les 200 conseillers qui seront en charge de la chose en leur donnant des stages de sensibilisation aux "situations d'agression"... et en leur donnant la charge de chômeurs n'habitant pas dans leur commune (afin d'éviter des rétorsions dans la vie quotidienne...)
Là où ça va coincer...
Radier les chômeurs, c'est une solution... surtout pour redresser la courbe du chômage et faire croire aux Français que la situation de l'emploi va mieux : moins d'inscrits, moins de chômeurs donc moins de chômage... magique, mais c'est un pur enfumage.
Mais le problème est que les agents de Pôle Emploi n'auront aucun objectif : ni en "nombre de contrôles" et surtout pas en "nombre de radiations". Autant dire que s'ils ne font rien personne n'ira leur taper sur les doigts.
Alors, qui va gagner ? Pôle Emploi ou l'empathie humaine ?